Résilience Organisationnelle Mise à jour du site juin 2023
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Newsletter N° 3 - Français

Colloque Ascencia et Congrès AIRMAP 2023

Colloque Ascencia

La résilience dans tous ses états

Préciser les contours de la résilience présente un nouveau un défi pour les chercheurs souhaitant la mobiliser dans leurs disciplines. L’intégration de la résilience dans différents domaines permet de nourrir le débat et d’étendre ce concept vers de nouvelles frontières (Cyrulnik, 2014 ; Grané & Forés, 2019 ; Puig & Rubio, 2011 ; Ungar, 2018; Vanistendael, 2014, 2015). Aujourd’hui, la résilience touche les sciences humaines et sociales ainsi que les sciences de gestion dans toute leur diversité (e.g. systèmes d’information, entrepreneuriat, marketing, RH, finance, management des organisations, stratégie, innovation, finance, comportement du consommateur, etc…). On peut dire que la résilience est la capacité d’une personne ou d’un groupe à se développer bien, à continuer à se projeter dans l’avenir, en présence d’événements déstabilisants, de conditions de vie difficiles, de traumatismes parfois sévères (Fondation pour l’Enfance, 2001, p.17). Des apprentissages internes et externes amènent l’être humain ou l'organisation à s’adapter à une nouvelle réalité. Cependant, une cicatrice est toujours présente ; elle fait partie de cette nouvelle vie (Vanistendael, 2015). Mais elle ne s’arrête pas à cette seule définition…

Car l’ensemble des questionnements autour de la résilience en sciences humaines, sociales, et de gestion font émerger plusieurs approches intéressantes.

  • La première est pratique. Face à un contexte de plus en plus incertain, la problématique de la résilience se pose aux différents acteurs. Comment cette résilience s’exprime-t-elle ? Peut-on mettre en évidence des invariants ou encore des trajectoires d’évolution ? 
  • La deuxième est méthodologiqueQuelles approches sont pertinentes pour saisir toute la complexité de la résilience ?  La troisième est scientifique et tient dans l’obligation du questionnement du chercheur. La circonscription de ce phénomène dans sa totalité est-elle possible ?

Cet appel à communication interroge l’ensemble des chercheurs sur leur vision de la résilience au regard de leur propre champ disciplinaire, qui est très vaste.

Dans quelle mesure l’ampleur de la crise que nous venons de traverser a-t-elle conduit à des changements parfois profonds dans les pratiques de gestion ? Faisons-nous face à des changements transitoires ou bien à des changements pérennes au profit de pratiques plus efficientes (Teneau, 2018; Teneau & Koninck, 2010) ? Ces changements ont-ils vocation à modifier les organisations ou bien les individus ? D’un point de vue méthodologique, quelles approches permettent de saisir les différents aspects de la résilience ?

Parmi les interventions les membres de la newsletter étaient présents, à ce titre Nicolas Dufour et Gilles Teneau sont intervenus pour une conférence sur la résilience face aux risques cyber : quels moyens pour la rendre effective ? Cas de recherche-intervention. Puis une seconde communication réalisée par Sophie Agulhon, contribution de la Génération Z à la résilience des organisations. Enfin nous avons participé à une table ronde «  La résilience dans tous ses états » avec messieurs Dufour, Teneau, Awata.

 

Résumé congrès AIRMAP

Les 24, 25 et 26 mai 2023 a eu lieu le 12ème colloque AIRMAP (Association Internationale de Recherche en Management Public) à Dijon ayant pour thématique « Le Management public, crises et post-crises : la permanence dans le changement ? » Plusieurs ateliers thématiques étaient présentés, notamment l’atelier 4 « Management public, développement et résilience des territoires : enjeux, défis et perspectives » et l’atelier 13 « Résilience des organisations, résilience des territoires : quels modes de réponse aux crises contemporaines ».

La résilience devient ainsi une thématique de plus en plus étudiée et notamment sur les territoires devenant plus durables et devant répondre aux différentes pressions des parties prenantes. Plusieurs communications ont pu être présentées, elles sont citées ci-dessous :

  • "Les territoires face aux chocs : Quel rôle des dirigeants des collectivités territoriales dans le renforcement des capacités de résilience ? Proposition de conceptualisation." Oriol Gillian, Du Boys Céline et Soldo Edina
  • "Sensemaking et économie comportementale, une approche combinée pour analyser la résilience des collectivités territoriales en temps de crise." Delabarre Aude et Alexandre-Bourhis Nathalie
  • "Building vs Dwelling during an industrial accident : a spatial perspective." Gisquet Elsa et Duymedjian Raffi
  • "D'une crise à l’autre, résilience et apprentissage organisationnel différenciés : le cas du musée des beaux-arts d'Orléans." Tanchoux Philippe, Abrioux Florence et Spieth Grégory
  • "Le récit et la pratique théâtrale comme vecteurs de résilience face à la crise écologique : cas d'une communauté littorale." Bernard Louise
  • "700 ans d'enchâssement percutés par les grands défis : effondrement ou adaptation ? Le cas de la routine de planification forestière à l'ONF." Bonin Frédéric
  • "La performance de la logistique institutionnelle, levier de résilience de l'action publique déconcentrée ?" Le Goff Joan et Kaposztas Flore
  • "Comment le NPM fragilise-t-il la construction de la résilience des organisations publiques ?" Masou Roula et Gangloff Florence
  • "Déléguer ou ne pas déléguer en situation de crise ? Points de vue de professionnels de santé sur la délégation, pour des équipes résilientes et efficientes." Poitrin Lara, Le Bris Sophie et Martin Dominique

« La résilience est une capacité de faire face aux crises, à des situations de rupture par rapport aux routines, à un risque d’effondrement ou de blocage. L’apprentissage organisationnel est un élément moteur de la résilience (Meyer, 1982).  Un territoire résilient doit également faire face à des crises type guerre et sanitaires. La résilience est possible par des actions fédératrices et des petites victoires. L’adaptation relève des prémisses de la résilience. C’est un bricolage adaptatif, des allers-retours façonnés par l’environnement. La dimension individuelle est également importante puisque la résilience est un phénomène de répétition, un certain apprentissage. La première crise permet un effet de mémoire vivante ou par archive. La force de la résilience dépend de la capacité des acteurs » ("D'une crise à l’autre, résilience et apprentissage organisationnel différenciés : le cas du musée des beaux-arts d'Orléans."Tanchoux Philippe, Abrioux Florence et Spieth Grégory).

Bernard Louise s’est intéressée aux projets territoriaux de la Rochelle sur la neutralité carbone, ce qui impacte le mode de vie et un changement culturel. La responsabilité individuelle des individus est importante. Les arts permettraient d’ouvrir de nouvelles manières de voir, d’appréhender, ce qui permettrait à terme de mobiliser les habitants du territoire à travers les interventions publiques (Bergeron) et les nudges (Thaler et Sunstein). L’utilisation de récits (Boje) est également envisageable. L’approche narrative pourrait donc compléter les outils de la résilience des territoires.

Enfin, une étude porte sur le rôle des dirigeants des collectivités territoriales dans les renforcements des capacités dynamiques de résilience territoriale. Les Hauts Managers Publics doivent anticiper les crises pour y faire face (Boin). La résilience peut se voir sous forme de résultat ou de processus. Il existe la résilience individuelle (psychologie, tempérament, capacité d’adaptation) et la résilience organisationnelle (Boin). La collectivité locale est un acteur pivot de la résilience du territoire car elle coordonne techniquement et organisationnellement. Ainsi le développement des capacités dynamiques induit le changement et sont formalisées par l’apprentissage. L’intentionnalité managériale est au cœur du renforcement (Teece). La résilience encrée dans des projets de crises est propice à l’apprentissage. La résilience des collectivités est de faire face aux crises, au changement, d’anticiper, mais cela pose un souci avec la Nouvelle Gestion Publique qui est peu flexible, et donc implique une refonte du management public.

Retour d'expérience de Jean-Philippe Gauvrit

Résilience Organisationnelle – TPE/PME

Je suis intervenu en octobre et en janvier derniers sur le thème de la Résilience Organisationnelle, auprès de dirigeants de TPE / PME, dans le cadre d’ateliers et de formations organisées par la CCI Seine-Estuaire au Havre (Semaine de la PME, formation PLATO).

L’objectif était de familiariser les entrepreneurs avec le concept de Résilience Organisationnelle et de réfléchir ensemble à ce que cela pouvait signifier dans leur environnement quotidien. Mes présentations s’appuyaient sur différents travaux et modèles (CIRERO, consultants internationaux, Université de Cranfield, etc..) et sur mon vécu de DAF et de Manager de Risques Entreprise, aujourd’hui de consultant et coach.

Ces deux séances d’introduction n’ont pas de caractère représentatif, mais je partage quelques observations et réflexions à la suite des échanges, qui pourraient être utiles pour mieux aborder la question de la RO dans ce type d’entreprises.

L’idée de résilience est familière, bénéficiant d’un effet de mode indéniable, et trouve un écho certain en regard des inquiétudes du moment. Mais le concept est mal connu, appliqué aux personnes (même pour les travaux d’auteurs « grand public » comme B. Cyrulnik), ou aux organisations. Il en découle une curiosité pour découvrir le sujet, qui reflète probablement le besoin d’articuler une réponse « organique » face à l’incertitude actuelle et à l’enchainement des crises, et à des enjeux de survie ou de transformation des organisations bien réels ; mais une curiosité alliée à une certaine méfiance.

Certains sujets ont suscité un intérêt ou des interrogations plus marqués que d’autres:

  • L’importance du sens et de l’identité, et de l’élément humain comme facteurs clés de résilience, thèmes mis en évidence lors des crises récentes (COVID-19), est largement reconnue, sans forcément savoir comment bien les définir et les actionner.
  • Comment mettre en pratique les processus de RO dans des petites structures ? Créer et activer des cellules de crises semble une pratique relativement familière, mais où trouver les ressources pour constituer des cellules de crise adaptées, y introduire de la diversité ou de la créativité ? Où trouver ou comment être des Toxic Handlers ? Sur qui s’appuyer ?  Comment rester simple ?
  • Quel leadership adopter ou ajuster en période de crise, entre désir de contrôle, délégation ou lâcher prise, pour un dirigeant dont la résilience personnelle est également en jeu et reste indissociable de celle de l’organisation ?
  • Avoir une image d’ensemble et évaluer la vulnérabilité organisationnelle est difficile ; accepter la vulnérabilité systémique, ou liée aux dirigeants et aux modèles mentaux de l’entreprise également (cf. la théorie processuelle de la crise, C. Roux-Defort ; P. Silberzahn pour les modèles mentaux).
  • Il y a eu en revanche peu de questions sur les outils d’évaluation ou de suivi de la RO, même si ce n’était pas le prisme principal de ma présentation.
  • L’évocation de l’Enquête Appreciative comme approche possible pour identifier les forces de l’organisation et retrouver du sens, a suscité curiosité et intérêt.

Quels enseignements et réflexions en tirer ?

Compte tenu du contexte économique actuel, et de l’intérêt reçu par ces présentations, il me parait important de continuer à partager et à expliquer les processus de RO, et de réfléchir à des approches adaptées aux TPE/PME. Je proposerais quatre axes :

  • Partir du vécu, mettre en évidence les approches résilientes que beaucoup de TPE/PME ont su trouver pendant les crises récentes ; questionner les vulnérabilités potentielles, et faire une mise en miroir.
  • Comment mieux utiliser un écosystème local généralement bien connu et maitrisé, qui peut apporter des ressources et des réponses, mais être aussi limitant dans sa vision des choses.
  • Mieux prendre en compte et intégrer la vulnérabilité et la résilience personnelle du Dirigeant, qui reste le principal porteur de sens.
  • Veiller à la simplicité des concepts et outils.

Journée de recherche - Face aux cygnes noirs des organisations antifragiles

Journée de recherche

le 05 octobre, 2023 au CNAM Paris, laboratoire ESDR3C, Equipe Sécurité Défense

Le Centre d’Investigation et de Recherche sur la Résilience Organisationnelle (CIRERO), organise avec le laboratoire ESDR3C du CNAM Paris une journée de recherche

Face aux cygnes noirs des organisations antifragiles

De nouveaux apports (résilience digitale, cyber résilience, gestion des risques hors cadres, cyber sécurité)

Objet scientifique de la journée

Les crises récentes ont mis en évidence la nécessité, pour les organisations, de développer leur capacité à faire face à l'incertitude lorsqu'elles sont confrontées à des crises hors cadres ou cygnes noirs (Lagadec, 2006 ; Taleb, 2013). Ces situations de crise sont une occasion pour étudier comment les organisations ont agi pour faire face à de tels chocs (Godé et al., 2020 ; Sein, 2020). La résilience organisationnelle est largement appliquée depuis le milieu des années 2000 (ONU, 2005). Nous constatons que les crises ont changé, elles sont hors cadres (Lagadec, 2010) et nos organisations doivent devenir antifragile (Taleb, 2010). Face à ces nouvelles turbulences (Pariès 2020), la résilience des organisations s’ouvre à d’autres champs de compétences (Suarez, Montes, 2021), tels que la résilience digitale, la cyber-résilience, l’apport des systèmes d’information et des nouvelles technologies (Frimousse, Peretti, 2021). La résilience digitale est considérée comme un facteur de résilience (Chair, Bounid, 2022). La robustesse technique des SI permet de garantir la continuité d’activité ou encore la capacité des organisations à s’organiser pour résister aux cyberattaques (Rothrock, 2018) sont considérées comme autant de formes de résilience digitale par les auteurs. La littérature professionnelle mobilise également la notion de résilience digitale pour discuter de cyber-résilience (https://www.bearingpoint.com/fr-fr/publications-evenements/publications/resilience-cyber/). De même les champs de la résilience aux regards des multiples organisations, micro, méso ou macro (Besson, Rowe, 2011), de formes idéologiques ou non idéologiques (Boisselier, 2023), qu’elles soient réelles ou virtuelles (Geoffroy 2019), stratégiques, défensives, offensives, marchandes ou non marchandes, évoluent face aux chocs multiples accélérés (Teneau, Pautet, 2018). Cette journée de recherche, prémices à un colloque, sera l’occasion de réfléchir à ces nouvelles tendances propres à la résilience de nos organisations.

Thèmes spécifiques de la journée

La cyber-résilience apport à la continuité d’activité, se prémunir contre les attaques

L’apport des systèmes d’information à la résilience des organisations

La résilience opérationnelle dans le cadre de la géostratégie

Les infrastructures de la marine nationale, des organisations antifragiles

La résilience des organisations dédiées aux situations critiques

Face aux crises hors cadres, apport de la résilience digitale et de la cyber-résilience

La résilience des organisations idéologiques

Transformation digitale pour une organisation antifragile

Renseignement et résilience : anticipation et réduction des incertitudes

Définition et démocratisation des concepts (sûreté de fonctionnement ; cybersécurité ; cyber-résilience ; résilience digitale ; antifragilité ; crises hors cadres ; cygnes noirs)

Apport du numérique à l’influence et à la guerre informationnelle, vers une résilience de la défense nationale

Protocole de soumission et d’évaluation

Envoi des intentions de communications avant le 31 juillet à gilles_teneau@yahoo.fr

Intention de communication sur 2/3 pages

Titre et champs de la recherche, mots clés, enjeux, axes, problématique, hypothèses et question de recherche, positionnement épistémologique, cadre méthodologique, éléments des résultats et bibliographie

Date d’acceptation des intentions de communication fin juillet

Les communications seront évaluées par un comité scientifique restreint

Soumission V1, V2, etc. pour publication dans les cahiers Risques et Résilience après la journée de recherche

MBA Management et communication de crise

Présentation du MBA Management et communication de crise, dès octobre 2023

DeVinci Executive Education

Par Thierry PORTAL et Clément JOCTEUR MONROZIER co directeurs pédagogiques

Nous vivons tous les jours dans un état permanent de crises, violentes et protéiformes. Les entreprises, les institutions, les communautés, les sociétés n’échappent plus à cette « ère Damocléenne » prédite par Edgar Morin dès les années ’90 dans son livre « Terre Patrie ». Qu’il s’agisse de crises globales (ex : covid-19) comme de crises ponctuelles, nous sommes noyés sous le flot d’évènements quotidiens “catastrophiques qui donnent à notre époque désenchantée un air de fin du monde. Ramené aux seules entreprises, le passage par une phase de crise est devenu inéluctable. Scandales, accidents techniques, drame sanitaire, ruptures subies, opinion publique et réseaux sociaux, guerre concurrentielle et impacts sociaux ou environnementaux constituent depuis quelques années la trame quotidienne de nouveaux défis à relever par les acteurs économiques. Ceux qui s’y confrontent en sortent parfois plus forts en revitalisant leurs fondamentaux managériaux. Minoritaires encore aujourd’hui, ceux qui s’y préparent trouvent souvent un nouveau souffle. 

A l’inverse, la grande majeure partie des entreprises utilise, faute de ressources, de simples expédients. Sans préparation réfléchie, sans maturité organisationnelle acquise, celles-ci multiplient les ignorances managériales et cultivent les solutions illusoires. Cette capacité à l’aveuglement collectif nourrit d’autant plus les terrains favorables que, lorsqu’une crise survient, il est déjà trop tard : à l’heure de la 5G, la vitesse vous submerge, le temps vous échappe. Il suffit en effet d’un événement mal contrôlé pour déclencher de suite un cycle de répercussions aux effets délétères et aux impacts ravageurs (perte de marchés, de réputation ou de cohésion interne). Quelle que soit leur taille, localisation, secteur d’activités, les entreprises deviennent très vite de parfaits boucs émissaires, responsables de leurs actes comme de ceux des autres. Vient alors le temps des polémiques, des controverses, des conflits et des scandales entraînant mise en responsabilité et atteinte à la pérennité de leurs activités. Ce constat est sans appel. Se posent alors trois grandes séries de questionnements, auxquelles DeVinci Executive Education souhaite répondre, réparties en autant de blocs de compétences : Comment faire pour trouver du sens et prévenir un tel déluge ? Comment traverser l’inéluctable ? Comment faire de la communication un levier utile ?

Les meilleurs spécialistes, dont Gilles TENEAU (qui a accepté par ailleurs de rejoindre le Comité pédagogique stratégique du MBA), présenteront leurs savoirs, leurs pratiques aussi, leurs doutes enfin : agir dans un monde incertain relève d’une réelle lucidité, « cette blessure la plus rapprochée du soleil » pour paraphraser le poète René Char. DeVinci propose donc une culture de crise, un champ d’expériences pratiques, et peut-être un “chemin de sagesse”.

1)       BLOC 1 - Comment faire pour trouver du sens et prévenir un tel déluge ?

La survenue d’une crise interroge jusqu’aux fondations de nos organisations. Elle révèle autant nos échecs collectifs, tel un iceberg se renversant qui en montre l’indicible, que nos propres failles individuelles (émotions et sentiments plus ou moins vertueux). Comme en photographie, une crise agit comme un négatif de nous-même, exposant ce que l’organisation et sa gouvernance désiraient jusqu’ici voir occulté. DeVinci propose un programme spécifique pour « entrer dans cette culture des crises », construit autour d’un 1er bloc mettant en scène les connaissances fondamentales pour comprendre ce dont on parle.

Aux risques d’entreprises considérés comme traditionnels (incendie, explosion, atteinte à l’environnement, produits défectueux, etc.), s’ajoutent aujourd’hui de nouveaux enjeux : la maîtrise des technologies de l’information, le poids de l’opinion publique et des minorités militantes, l’amplification de la sous-traitance, le renforcement des contraintes juridiques, l’impact sanitaire ou climatique... Aujourd’hui, toutes les entreprises, grandes et petites, sont exposées. Surtout, travailler sur l’idée de crise et sa prévention nécessite de dépasser ses seuls aspects destructeurs pour s'interroger sur le potentiel d'apprentissage et de transformation qu'elles offrent en mettant les entreprises dans la position inédite de donner un sens nouveau à leur action.  Évoluer ne revient-il pas à changer de niveau d’erreur ?

2)       BLOC 2 - Comment traverser l’inéluctable ?

Tout le monde évoque « la gestion de crise ». Mais de quoi parle-t-on ? Il y a encore peu, certains parlaient de crash management (que faire quand les dégâts ont déjà été causés ?) alors que se déployaient déjà des pratiques de crisis management (prévenir, se préparer, réagir et capitaliser sur les crises). Alors de quoi parle-t-on en fait ? En quelques années, le management de crise est devenu un enjeu stratégique non seulement pour préserver la légitimité et la pérennité des organisations en cause mais aussi pour garantir le bien-être des communautés et des sociétés dans lesquelles elles évoluent. De nombreux outils existent aujourd’hui pour préparer les entreprises à affronter des situations dégradées. Ainsi, plans, normes, nouvelles pratiques se révèlent qui permettent aux plus audacieux de réagir à bon escient en sortant du trop classique schéma, décrypté par le chercheur C. Roux-Dufort : « agir sans voir ; voir sans agir ; réagir pour ne pas voir ; réagir pour réagir ».

Il en va aussi de la capacité de discernement des équipes dirigeantes d’une entreprise, du niveau de cohésion interne qu’elles suscitent, du style de leadership qu’elles incarnent. Celles qui réussissent présentent souvent des qualités rares (concentration, énergie, finesse de jugement, anticipation, humilité et calme). Autant de vertus qui permettent de préparer l’organisation à traverser l’orage, de prendre à chaud les meilleures décisions, de déterminer en confiance une trajectoire d’amélioration. Ce bloc important se terminera par un ZOOM sur la clôture et l’après crise. Partons du principe qu’une crise est rarement close ! Même hors champs des médias, elle ne disparaît jamais complètement, surtout dans la mémoire du web, le temps judiciaire ou encore l’exploitation que peuvent en faire les parties prenantes. La cicatrisation peut prendre un temps infini. Surtout, la crise sera vraiment négative si on la subit sans la comprendre et l'exploiter. Ainsi, les entreprises ont le choix entre : ne rien apprendre de l’événement ; capitaliser sur lui pour améliorer sa gestion de l’urgence ; remettre en cause les évidences managériales et organisationnelles ; faire de la crise un levier pour redéfinir l’identité globale de l’entreprise.

Or, la plupart du temps, les organisations évitent (ou ne prennent pas le temps) de jeter un regard rétrospectif sur la manière dont elles ont affronté l’évènement. C’est toute la difficulté d’un Retour d’Expérience (RETEX) bien mené, dépassionné, transparent et sans jugement. Phase ô combien délicate qui révèle trop souvent l’autosatisfaction, la désinformation illusoire, le poids du politiquement correct, la peur du jugement, le risque de règlements de compte, l’hyper confidentialité ou encore l’étouffement des veilleurs. Nous partirons donc du principe que le management de crise consiste à clore celle-ci et à en extraire toutes les opportunités latentes pour l'entreprise : mesures correctrices nécessaires ; nouveaux schémas de réponse ; culture de crise commune ; esprit de résilience ; maturité organisationnelle ; transition et retournement …

3)       BLOC 3 - Comment faire de la communication un levier efficace ?

« Un mot et tout est sauvé » écrivait André Breton.

Partons de quelques principes simples pour exposer le programme de ce troisième bloc consacré à la communication en temps de crise. Un dispositif de communication de crise ne permet pas d’éviter la crise mais il constitue une composante fondamentale de la gestion globale d’une crise : il n’a de sens que s’il s’articule avec la gestion elle-même de la crise. Plus grave encore : « Qui ne maîtrise pas la crise d’information ne maîtrisera pas la crise, y compris dans ses aspects directement opérationnels. » (J. Scanlon).

De plus, la communication de crise obéit à des règles et des dynamiques médiatiques qui lui sont propres telles que, par exemple, le poids des perceptions du grand public (émotions primaires), l’historicité et l’acceptabilité sociale d’un sujet/projet ou encore les effets amplificateurs. Autrement dit, on peut avoir juridiquement et techniquement raison mais médiatiquement tort ! Face aux publics, les seules dimensions rationnelles ne suffisent pas… « Il n’y a pas de vrai, pas de faux : il n’y a que des affrontements de points de vue. » (P. Lagadec, X). S’il est difficile d’évaluer « après coup » l’apport réel de la communication en cas de « succès » dans le management d'une crise... il est très facile de constater, lors d’un échec, dans quelle mesure elle est imputable à une mauvaise communication. C’est toute la difficulté d’une bonne communication de crise !

Un ZOOM sur l’impact des réseaux sociaux (Rx Sx) dans le management d’une crise clôturera ce dernier bloc. Nous vivons –et le mouvement s’accélère - dans un environnement volatil et désintermédié où les comportements évoluent. « Le monde était vertical ? Il devient horizontal. Siloté ? Il est communautaire. Séquentiel ? Rien ne vaut que le temps réel » (C. Dexemple). L’opinion publique s’est fragmentée en opinions multiples, composites et instables. Et chacune compte y jouer un rôle, à un titre ou à un autre. Ainsi, consommateurs, citoyens, partenaires ou employés attendent plus de transparence et plus d’immédiateté. Les demandes d’information se veulent instantanément satisfaites et l’ensemble exige une communication plus réactive, plus continue et plus personnalisée : c’est la marque des réseaux sociaux où les informations, les rumeurs et les émotions se partagent instantanément avec 10, 100, 500 amis et followers avec un redoutable effet de démultiplication et de capillarité dans un monde ouvert où chacun prend la parole. Ambivalents, les Rx Sx peuvent aussi se montrer utiles en temps de crise. Le nouvel horizon de la gestion de crise ‘numérique’ ouvre d’immenses perspectives où chacun peut, à sa manière, contribuer à la résolution d’une crise : alerte, diffusion d’informations de sauvegarde en masse, mais aussi applications mobiles (ex : TousAntiCovid), simulation des pressions exercées par les parties prenantes, suivi des Rx Sx…

INTERVIEW de Charlotte Brown

Portrait

https://www.resorgs.org.nz/about-resorgs/our-people/

Dr. Brown est une chercheuse Néo-zélandaise spécialisée en gestion des catastrophes. Elle est également experte en résilience organisationnelle.

Membre d’organisations résilientes, groupe de recherche et de conseil spécialisé dans le risque et la résilience organisationnelle. Elle soutient des organisations de toutes les tailles, de tous les secteurs et de tous les types aux changements perturbateurs.

Établie en Nouvelle-Zélande, Dr. Brown collabore régulièrement avec les services publics dans le domaine des infrastructures essentielles et des voies de vie.

Cet été, nous avons eu le plaisir d’interviewer Dr. Charlotte Brown pour parler de résilience organisationnelle. Elle nous a fait part de sa vision à ce sujet, de son expertise et de sa collaboration avec les organisations néo-zélandaises pour mieux se préparer à l'incertain.

Focus sur Dr. Brown. Au cours de cette interview, elle nous donne les clés des principaux éléments et concepts à aborder afin de développer une théorie de la résilience organisationnelle.

Voici le lien pour voir la vidéo.

https://eduservices-my.sharepoint.com/personal/joanice_guimbretiere_eduservices_org/Documents/Enregistrements/Organizational%20resilience%20meeting-20230607_101250-Enregistrement%20de%20la%20r%C3%A9union.mp4?web=1